Il aura fort à faire dans un climat de paranoïa général (alimenté par le gouvernement lui même) à l’égard de tout ce qui s’apparente de près ou de loin à des privilèges.
Comment légitimer un mécanisme fiscal dont l’efficacité contestée fait échos à des leitmotivs aussi cinglants que « L’outre-mer, ça coûte cher ! » (intitulé un tant soit peu provocateur de la conférence-débat organisée par « Science ô », l’association de Science Pô le 16 avril 2013) ?
En Février 2009 déjà, le journal le Figaro titrait « les Outre-mer coûtent près de 7 milliards à l’Etat ». En période de disette budgétaire, ces arguments font mouche.
Ne soyons pas dupes, l’Outre-mer est largement perçu comme un puits sans fond, comparatif qui au demeurant ne s’appliquerait pas aux autres départements de l’hexagone. Comme si cela ne suffisait pas, le récent élan de moralisation de la vie politique a conduit certains élus à anticiper la publication de leur patrimoine. C’est ainsi que l’on a appris que le Député Réunionnais Thierry Robert annonce détenir pour 9 millions d’euros de biens immobiliers et percevoir 90 000 euros de revenus mensuels. Nous en sommes tous ravis… Tous ? Pas sûr. Certains esprits mal inspirés y voient déjà une dérive de la défiscalisation.
Il est vrai que ces dispositifs fiscaux dérogatoires et louables bénéficient avant tout aux personnes disposant de revenus financiers leur permettant d’investir en Outre-mer. Prenons l’exemple d’Ikéa. Vous aurez beau chercher l’enseigne en Outre-mer, vous ne la trouverez pas. Elle utilise néanmoins la défiscalisation.
Le 14 février 2013, BFMTV révélait que : « La filiale française de l’enseigne (Ikéa) a fait un usage intensif de la loi Girardin, qui permet de déduire de ses impôts les investissements effectués en Outre-mer… Au total, selon les comptes, ces différentes filiales de défiscalisation ont permis à Ikea France de réduire l'impôt sur les bénéfices de 34,7 millions d'euros sur l'exercice clos fin août 2010, puis de 35,6 millions d'euros sur l'exercice suivant. ». De quoi faire grincer Bercy des dents.
Ajoutez à cela la vente défiscalisée de yachts permettant à de nombreux sites Internet étrangers d’afficher la mention : « French Government pays for 55% of your Yacht in the Defiscalisation Programme » (Le gouvernement français finance 55 % de votre Yacht grâce au dispositif de défiscalisation).
On ne peut que regretter cette maladresse car la défiscalisation ne se résume pas au cliché du riche qui veut gagner encore plus d’argent, elle constitue un levier indispensable à l’économie de nos régions, perfectible, certes, mais indéniable.
Dans une période où la politique nous invite à regarder ce que l’autre a dans son assiette (fiscale), ces polémiques risquent à très brève échéance de semer la confusion dans l’esprit de nos concitoyens entre défiscalisation et fraude fiscale.
Ce ne serait que la suite logique d’une conception simpliste et paradisiaque de l’Outre-mer, entre soleil, sable chaud, mer, yachts… Bref, presqu’un « paradis fiscal » non pas cible du G20 mais, au train où vont les choses, de Bercy.




